26 janvier 2014

Silver lining in Laos

Le Laos, c'est un beau pays, mais comme souvent dans les voyages, tout ne roule pas comme on le voudrait. La voiture est tombée en panne, on a roulé au pas pendant des heures, et quand il atteignait les 60 km/ heure, le chauffeur prenait peur et ralentissait.
Le pire, c'est quand on a atteint Nong Khiau. Village encaissé entre de hautes montagnes, au bord d'une très jolie rivière, la Nam Ou. La Nam Ou, a part servir d'autoroute entre les villages reculés et Nong Khiau, est un affluent du Mékong. 
Quand on part chercher l'exotisme, on le trouve.

Oui, mais on voudrait bien aussi que tout se déroule comme l'a dit le programme. Si le programme le dit c'est que ça ne peut être que comme ça et pas autrement. Et voilà que le bel hôtel ou une chambre est réservée pour nous depuis longtemps a donné Notre Chambre a quelqu'un d'autre.
Grr...
-"Allez de l'autre côté de la rivière, vous allez voir, il y a un bel hotel tout neuf, très beau, avec une piscine", (comble du luxe dans cette région reculée). Bon, on est pas très contents, mais on y va.
Nous sommes accueillis par un allemand charmant, qui maitrise le français. Il est désolé, il a séminaire yoga-méditation. Toutes ses chambres sont prises. Pas si reculée que ça, on dirait la région?
Re-grr, très marqué du côté de Monsieur Garden.
On nous balade encore de guest house en petit-hôtel-qui-ne-paye-pas-de-mine. Monsieur Garden explose.
-"Puisque c'est ainsi, nous rentrons a Luang Prabang! Tant pis pour de nouvelles longues heures de route! Nous rentrons, c'est dit!"
Il ne veut plus avancer, reste renfrogne au fond de la voiture. Je vais seule voir un autre endroit, pas très accueillant de l'extérieur, la chambre est tout a fait correcte. Mr Garden vient voir, on se dit que pour une nuit seulement, c'est pas si mal et que l'on pourra poursuivre le voyage comme prévu.

La chambre est bien, on entend un peu beaucoup la télé de la chambre d'a côté, le son trop fort. Mais de grands tissus oranges sèchent sur la terrasse,  on ne dit rien pour le bruit.
On se promène dans le jardin, c'est beau, c'est le long de la rivière, devant de très hautes falaises, des montagnes élevées, un paysage magnifique. Soudain une fille surgit les bras plein de légumes et s'adresse a nous comme si on se connaissait depuis toujours. Elle parle un anglais parfait, avec un adorable accent australien (d'habitude l'accent australien est le plus horrible du monde), elle a fait ses études la bas, puis est revenue au pays pour ouvrir sa propre guest house.
-"Vous avez commandé votre repas de ce soir?" Comme si on habitait ici depuis plusieurs jours et qu'on avait largement eu le temps de se faire aux coutumes de l'endroit.
-"Non, justement on vous attendait, et on commande tout de suite."
Elle est adorable, on commence a être rudement contents de s'être fait viré de l'autre hôtel. Tout le monde est gentil ici. Et on nous dit que le repas nous est offert suite aux déboires vus plus haut et suite a la grosse colère de Mr Garden, pourtant déjà oubliée. Des moines en robe orange vif et orange plus foncé se promènent partout.

Le repas est délicieux, comme il est gratuit, on s'offre une bouteille de Merlot du Chili pour fêter notre mauvaise fortune, on entrevoit nettement les contours argenté derrière le nuage noir, le silver lining, (explication du titre pour les non anglophones qui me lisent.)
Grâce au vin et a l'excellent matelas, on dort très bien. Bien sur de l'autre côté de la cloison, a 4 heures du matin, heure des prières et de la méditation, la télé Thaï se met a hurler a nouveau. Robe orange. On dit rien. On se rendort.
Au petit déjeuner, ils sont tous la, les moines, robes oranges, bonnet sur la tête, emmitouflés dans des couvertures, oranges aussi. On est dans les montagnes, il fait très froid la nuit. Ça caille ici. On déjeune dehors sur la terrasse près de la rivière, il fait 8°, peut être 10°. Le pain et le café sont délicieux,  je me lève pour prendre mes bruyants voisins en photo. Ils posent gentiment, l'un d'eux mange du bétel. Je ne conseille pas l'odeur du bétel le matin avant le petit déjeuner. Et comme il y a la wifi partout, dans cette région pas si reculée que ça finalement, je poste les photos sur Facebook. Et je leur montre.

Ils sont fous de joie, ils ont tous leur téléphone portable, ils sont tous abonnés a Facebook! Je tombe des nues. Et moi aussi, je suis folle de joie. On est tous super contents super heureux. On se prend en photos, on se retrouve tous sur les Facebook les uns des autres. Pour que Sathu puisse rentrer mon mail sur son téléphone, je lui prends le téléphone des mains, je tape le numero, et....
Je ne peux pas le lui rendre!! Il ne peut pas accepter quelque chose des mains d'une femme, une qui de plus est debout a sa hauteur! Pourtant la veille a Luang Prabang, j'avais bien compris qu'il fallait être a genoux pour les offrandes, par signe de respect. La ils ont beau être en vacances et très cool, il y a quand même des choses qui ne sont font pas. Bon, je dépose le téléphone dans son écharpe, et l'incident est clos. Je fais encore deux trois gaffes du même acabit, et je comprends enfin a la dernière photo que c'est mieux de m'asseoir par terre, même s'ils me font fait une place sur le banc a leur côté.

Décidément on est super contents d'avoir échoué dans cet endroit extraordinaire, contre notre propre volonté. Cela nous montre que la veille au soir, quand on grognait, c'est qu'on avait pas compris qu'il fallait suivre le flot de la rivière, qu'on était loin du Tao de la vie, et pourtant, notre KARMA nous réservait de belles choses.
Car tout le reste de la journée a été pareil. La rencontre de Suzanne et Hans dans la pirogue qui remonte la rivière Nam Ou jusqu'à Muong Ngoy, la marche dans les rizières asséchées, les villages Hmong, mama Kham, traverser pieds nus la rivière parce que le pont est tombe, les beaux tissus cardés et tissés devant nous, les paysages, le dîner, et tout le reste du séjour, le Laos, les Laos, peuple magnifique et tellement attachant, qu'il restera ancré en nous pour longtemps.